Représentation des pratiques de Thérèse Bégin relatif au monde animal nommé: Innu de Mashteuiatsh (Québec), 2013


PRÉSENTATION

La carte illustre le territoire occupé par les Innu de la communauté amérindienne de Mashteuiatsh lors de leurs activités de chasse et de pêche. Il s’agit ici de la famille de Thérèse Bégin. (cliquez ici pour voir la carte)

Dans un contexte de réappropriation culturelle, le peuple innu de la Première Nation innu (anciennement les Montagnais) de Mashteuiatsh, située près de Roberval, dans la région du Lac-Saint-Jean (Québec- Canada) compte différentes sphères pour redéfinir son identité. Que ce soit par le mode de vie, le patrimoine matériel ou immatériel, tous ces éléments servent à déterminer l’appartenance des Ilnuatsh. Depuis quelques années, les Pekuakamiulnuatsh ou Innu du Lac-Saint-Jean ont entamé un cheminement de retour aux sources.

La recherche qui a été réalisée porte sur les pratiques traditionnelles (chasse, trappe, pêche, cueillette). Elles sont régies par un concept particulier nommé l’ilnu aitun. Cette notion est la base de tous faits et gestes perpétués depuis des millénaires et continue d’être appliquée dans le contexte d’aujourd’hui. C’est à partir de récits réalisés avec deux personnes de la communauté de Mashteuiatsh que cette étude a été effectuée. De leur témoignage, il a été possible de réaliser une nouvelle forme de cartographie relatant leurs trajets à travers la forêt qu’ils habitent. Les thèmes des entrevues étant axés sur les pratiques et le monde animal, on a pu établir un portrait du régime alimentaire. Le cycle des saisons et la migration des familles sur le territoire ont grandement influencé le menu de ces nomades.

Nous y trouvons une description de ce régime basé essentiellement sur des animaux chassés. Appuyée de notions de la géographie culturelle, l’étude constitue déjà une référence pour celui ou celle qui veut en connaître davantage sur les us et coutumes des Pekuakamiulnuatsh.

UN GARDE-MANGER UNIQUE

Ce qui est remarquable dans la carte sur le monde animal dans le territoire de Thérèse Bégin, c’est que même si la famille était en déplacement et hors des frontières de son territoire, elle s’adonnait, comme la famille de Gordon Moar, à des pratiques de pêche à la ouananiche, à la pose de collets pour le lièvre et à la chasse à la perdrix. Comme mentionné précédemment, le territoire est un lieu ouvert et selon le droit coutumier innu véhiculé, on pouvait s’y nourrir sans restrictions particulières.

Les déplacements entre les zones d’occupation servent également à apprendre les techniques particulières pour la chasse et l’apprêt des animaux. En effet, dans le récit de Thérèse Bégin, les enseignements de la part de ses parents faisaient partie de son quotidien, entre la chasse à l’orignal et la chasse à l’ours, elle apprenait.

Les zones 2 et 3 de la carte correspondent à un territoire lié à ce quotidien, car on y retrouve des camps pour résider plus longtemps et ceci permettait de faire des transferts de connaissances plus approfondies.

De son père, elle apprit les rudiments et les ruses liés à la capture des animaux. L’apprentissage le plus intéressant de son discours est sans doute celui lié à l’ours. Par exemple, ayant un besoin de graisse pour terminer l’hiver, le père de Thérèse Bégin décida d’aller chercher l’ours à la tanière et amena sa fille avec lui.

En référence à la carte du monde animal, un chasseur savait où trouver les savanes (tourbières), les montagnes de feuillus, les endroits propices pour trouver l’ours. L’expérience, l’observation, la transmission du savoir réunissent un ensemble de savoirs liés à cette chasse.

Quant à la mère, les enseignements se concentraient à préparer l’animal en lui enlevant la peau pour dépecer la viande. Elle savait quel type de bois utiliser pour conserver la viande ou pour la cuire. C’était des techniques et des savoirs détenus principalement par les femmes.

Pour Thérèse Bégin, les enseignements donnés par chacun de ses parents sont très distincts, mais complémentaires. À travers cette transmission, elle apprenait aussi comment se comporter en forêt, car dans les pratiques d’ilnu aitun, il existe un savoir-être et cela se déploie notamment par le partage du territoire entre les familles et même celles d’autres membres de nations voisines. Les frontières des territoires familiaux étaient ouvertes. Malgré les bornes limitrophes, les territoires des familles et ceux des autres nations demeuraient accessibles, et ce, malgré des délimitations géophysiques fixes. Tout est dans la manière d’agir afin de respecter les occupants de ce milieu.

L’occupation saisonnière du territoire laisse place à une variété nutritive souvent influencée par les caractéristiques écologiques du milieu occupé. Toutes ces actions mènent à une appropriation du territoire et à une organisation spatiale particulière.

RÉFÉRENCES

KURTNESS, Katia, (2013), Témoignage d'un homme et d'une femme ilnu sur les pratiques traditionnelles, Université du Québec à Chicoutimi, mémoire de Maîtrise en études et interventions régionales, M1696, ISBN 9781412319508, AC821 U71 1696, 207 pages.  Le livre en-ligne.

SOUTIEN FINANCIER

Atlas électronique du Saguenay-Lac-Saint-Jean

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Katia KURTNESS, Camil GIRARD et Carl BRISSON

Laboratoire d’expertise et de recherche en géographie appliquée (LERGA)

Atlas électronique du Saguenay–Lac-Saint-Jean, Université du Québec à Chicoutimi (www.uqac.ca/atlas). Juin 2014.