L’espace urbain de la ville de Saguenay – Arvida

BUT ET OBJECTIF

Le but de la carte est de montrer l’organisation territoriale et le développement de l’agglomération urbaine du secteur Arvida de l’arrondissement de Jonquière.

ASPECTS MÉTHODOLOGIQUES

L’analyse et l’interprétation de la carte se fait selon deux approches différentes. Premièrement, la découverte de l’agglomération se fait en circulant dans les rues d’Arvida. Deuxièmement, un arrêt sur la digue du lac de bauxite d’Alcan permet de visualiser les installations de l’usine.

COMMENTAIRE

Poste d’observation : En circulant dans les rues d’Arvida

L’agglomération d’Arvida n’a rien de commun dans son plan, dans sa structure et dans l’apparence générale de ses bâtiments, avec les autres secteurs de la ville de Saguenay. Son origine et les facteurs qui ont présidé à sa croissance expliquent cette différence.

Cette ville a en effet été construite à partir d’un plan tracé par des urbanistes américains au service de la compagnie Alcan (devenue Rio Tinto Alcan en 2006), au moment de l’installation de l’aluminerie en 1925. Ceux-ci ont prévu l’emplacement et le dessin de toutes les rues ainsi que la structure de tous les quartiers et des équipements collectifs, qu’ils soient industriels, commerciaux ou culturels. Par la suite, la croissance d’Arvida ne s’est pas faite selon un processus spontané puisque, à part quelques ajustements, le plan d’urbanisme initial a été respecté.

Les types de bâtiments qu’on rencontre dans ce secteur y sont aussi très spéciaux, étant le résultat de constructions faites en séries et par vagues successives: d’où cette uniformité du paysage urbain dans la plupart des rues et parfois dans l’ensemble d’un quartier.

L’omniprésence du plan d’urbanisation se traduit aussi par le tracé non géométrique des rues qui, contrairement à celui des villes de l’époque, n’a pas été dessiné en fonction de la circulation automobile. Ces rues bordées d’arbres, qui se présentent souvent en demi-cercles concentriques, permettent aux piétons de franchir une distance optimum entre leur résidence et les équipements collectifs de quartier; ces équipements sont généralement localisés au centre de ce dernier.

Le complexe industriel est situé à l’est de l’agglomération pour la protéger des vents d’ouest dominants; le centre-ville ne contient aucune résidence; le quartier des cadres supérieurs est à proximité des aménagements paysagers et sportifs, tels que le golf, les pistes de ski et les sentiers de la nature, au bord du Saguenay. Voilà quelques exemples de la rationalité du concept structurel de ce plan d’urbanisme.

Poste d’observation : sur la digue du lac de bauxite d’Alcan

L’aluminerie Alcan d’Arvida est une usine de production d’aluminium à partir de la bauxite. Il faut de quatre à cinq tonnes de bauxite pour obtenir deux tonnes d’alumine (ou oxyde d’aluminium) qui, à leur tour, donnent une tonne d’aluminium. Cette transformation se fait par le procédé de l’électrolyse.

Au Canada et dans d’autres pays, les usines d’électrolyse d’Alcan utilisent souvent de la bauxite jamaïcaine transformée sur place en alumine, dans les installations de la compagnie.

Mais à Arvida, on fait le processus complet de transformation à partir de la bauxite. Cette matière première provient en partie de la Jamaïque et en partie de la Guinée, en Afrique et elle est transportée par mer jusqu’à La Baie, à bord de navires. Elle est ensuite transportée à Arvida par le chemin de fer privé de l’Alcan après avoir été déchargée et entreposée dans les installations de la compagnie.

L’ancienneté de l’aluminerie d’Arvida (1925) explique sa taille immense. Il était en effet impossible à l’époque de sa construction, de localiser les installations industrielles grandes consommatrices d’électricité à de grandes distances des centrales hydroélectriques, à cause de la perte de courant, d’où la nécessité de concentrer la production en un seul point. De plus, une meilleure intégration fonctionnelle des différents départements du complexe industriel permettrait, dans une usine plus récente, d’occuper un espace beaucoup moins étendu. Ces raisons expliquent la fermeture des cuves plus anciennes et l’investissement dans les nouvelles usines (ex : Grande Baie, Laterrière et Alma).

L’énergie utilisée provient de tout un réseau de centrales hydroélectriques qu’Alcan a installé dans la région, principalement sur le Saguenay et sur la Péribonka. Le complexe Shipshaw Chute-à-Caron, sur la rivière Saguenay, est le principal pilier de ce réseau, produisant à lui seul 1 120 000 Kw. Une production de 400 000 Kw est faite aussi sur cette rivière à Alma. La Péribonka, quant à elle, fournit un total de 1 160 000 Kw répartis sur les trois centrales de Chute-du-diable, Chute-à-la-Savane et Chute-des-passes. Selon le guide de presse 2004 de la compagnie Alcan, la capacité totale de production électrique dans la région est de 2 687 Mw, cela serait assez suffisant pour fournir de l’électricité à une ville d’environ 675 000 habitants (l’agglomération de Québec).

Les personnes qui travaillent sur ce site Industriel demeurent à Chicoutimi, Jonquière et Arvida dans une proportion à peu près égale. Il s’agit d’une main-d’oeuvre relativement spécialisée, dont les conditions de travail se sont graduellement améliorées depuis le début, grâce à une des syndicalisations les plus hâtives du Canada. Les salaires y ont toujours été élevés mais ils ont été dépassés depuis quelques années, par d’autres secteurs industriels dans la région, dont surtout l’industrie du papier. Même si Alcan progresse dans la quantité d’aluminium et d’électricité produit dans la région, la compagnie a réduit de façon importante le nombre d’employés, passant de près de 9 000 en 1980 à moins de 5 900 en 2004.

En 1975, la production d’aluminium produite dans les deux alumineries (Arvida et Isle-Maligne) s’élevait à 525 000 tonnes métriques. Les lingots d’aluminium qui sont coulés dans la région y sont transformés dans une très faible proportion. Ils sont expédiés par la route, la mer et le chemin de fer sur les marchés internationaux dont principalement les États-Unis mais aussi au Royaume-Uni, en Europe continentale.

En 2003, ce sont dorénavant quatre usines (Arvida, Grande-Baie, Laterrière et Alma qui a remplacée Isle-Maligne) qui produisent 977 800 tonnes métriques. Cependant, des quatre usines en opération, celle d’Arvida est la plus vétuste. Déjà en 2003, les salles de cuves utilisant le procédé Soderberg ont été définitivement fermées et démolies. De plus, sur le site actuel de l’usine Arvida, une première phase de nouvelles salles de cuves (AP-60), beaucoup plus performantes, est en cours de construction. Débuté en 2010, cette nouvelle aluminerie sera construite en trois phases pour atteindre une production annuelle de 430 000 tonnes d’aluminium.

Le portrait des expéditions a quelque peu changé. En effet, même si les lingots sont toujours majoritairement expédiés sur les marchés internationaux, ces lingots sont dorénavant destinés presque exclusivement vers les États-Unis et une petite proportion qui prend la mer vers l’Europe de l’Ouest.

Ces expéditions de lingots d’aluminium, lesquels peuvent pratiquement être considérés comme la matière première à un grand nombre d’industries secondaires, représentent un potentiel industriel dont la région du Saguenay souhaiterait en profiter davantage.

RÉFÉRENCES

BOIVIN, Roger, (2004), Évolution de l’utilisation du territoire de Ville de Saguenay 1997-2001, Québec, Université Laval, Mémoire de baccalauréat en géographie, 213 pages.

BOUCHARD, Louis-Marie (1973), Les villes du Saguenay : une étude géographique, Chicoutimi, Fondation de l’Université du Québec à Chicoutimi, 212 pages.

DUFOUR, Jules (sous la direction de) (1978), La géographie du Saguenay–Lac-Saint-Jean (Province de Québec) guide d'excursions scientifiques, Chicoutimi, UQAC, Module de Géographie, Collection Travaux géographiques du Saguenay, no 3, 220 pages.

GAUTHIER, Majella-J. et Louis-Marie BOUCHARD (sous la codirection de) (1981), Atlas du Saguenay–Lac-Saint-Jean, Chicoutimi, Gaëtan Morin éditeur, 97 planches.

GIRARD, Camil et Normand PERRON (1989), Histoire du Saguenay–Lac-Saint-Jean, Québec, Institut québécois de recherche sur la culture, Collection Les régions du Québec, 665 pages.

SIMARD, Martin et Majella-J. GAUTHIER (2004) “Les enjeux territoriaux associés à la réforme municipale. Le cas de Saguenay”, Cahiers de géographie du Québec, vol. 48, no 134, p.191-207.

SOUTIEN FINANCIER

Comité de liaison institutionnel (CLI-UQAC)

Fonds des enseignements médiatisés (FEM-UQAC)

Carl BRISSON et Simon OUELLET, Laboratoire de recherche et d’expertise en géographie appliquée, Camil GIRARD, Groupe de recherche sur l’histoire, Université du Québec à Chicoutimi, mars 2012.